mardi 11 octobre 2011

Spleen et Idéal (féminin)

J’ai constaté que dans le monde du cinéma, une actrice, piquante en sa prime jeunesse, embellissait avec l’âge — ainsi Romy Schneider, petite princesse d’opérette à dix-sept ans dans Sissi de Ernst Marischka, amante désabusée à trente ans dans La Piscine de Jacques Deray —; qu’il pouvait y avoir un décalage entre son image à l’écran et son réel visage dans la vie — ainsi Marilyn Monroe, ravissante et joyeuse idiote dans les chefs d’œuvre de Billy Wilder, femme secrète et en détresse, hors champ, sous l’objectif des photographes de plateaux — ; ou que sa personnalité même, justement, était nécessaire pour incarner des rôles puissants, ainsi Gena Rowlands de Faces à Lovestream de John Cassavetes. Et sans doute est-ce le septième art, grâce à quoi je fis très tôt mon éducation esthétique et sentimentale — où est la différence ? — qui me persuada aussi de toute la force de cette remarque de Baudelaire notée dans un journal intime : « Je ne prétends pas que la Joie ne puisse s’associer avec la beauté, mais je dis qu’elle en est un des ornements les plus vulgaires, tandis que la Mélancolie en est pour ainsi dire l’illustre compagne […] ».

14 commentaires:

  1. Frederic,

    Desaccord à cent pour cent. Sortira t'on un jour de ces antiques mais persistants jugements de valeur : une femme qui à l'air grave ou mélancolique aurait un pouvoir de séduction plus grand qu'une autre plus enjouée ? A mon avis les femmes les plus seduisantes sont celles qui sont d'abord elles mêmes. Et je préfère cent fois une femme qui me fait rire à une autre qui feindrait la gravité ou la tristesse. (Je vous accorde que Madame Gena Rowlands est irresistible). Je crois même que cette demande de mélancolie chez la femme de la part du mâle n'est qu'un tres vieux desir animal de domination travesti par des mots, paternaliser encore et toujours...Ah, être le consolateur, que c'est vieux jeu (même gnangnan). Une femme qui rit à gorge déployée, qui vous provoque, vous surprend et qui a de l'esprit c'est encore plus beau, une telle force de vie, on a envie de partir avec elle n'importe où. Je vous laisse donc à vos films en noir et blanc et vos rêves étranges et penetrants de femmes inconnues etc...

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  2. Les bonnes femmes enjouées ? De l'esprit ?

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  3. Il n'y a pas de jugement de valeur dans ce que dit Frédéric. C'est une observation et elle est juste. Regardez autour de vous Karl. La mélancolie est le résultat d'un certain nombre d'épreuves, d'accidents, d'erreurs, de revers, comme la somme de désillusions dont on a fait les comptes et qu'aucun "sens" n'éclaire. Ce n'est pas une posture qui chercherait une pseudo attention masculine, c'est un état d'être que rien ne peut atteindre, ni modifier, ni apaiser. Pour autant, il y a de quoi rire, car tout est risible, mais on rit bien mieux quand on sait pourquoi on rit. Celui qui n'a pas compris cela n'a rien compris aux femmes.

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  4. Cher V ou chère V,

    La melancolie, version française, ce n'est que très rarement l'expression de la "maladie du temps". Plutôt le bonheur petit ou grand bourgeois d'etre triste en ressassant ses petits ou grands malheurs, réels ou imaginaires. La saudade bresilienne (les portugais ou les hongrois connaissent aussi cela je crois) a elle une vraie poesie, un vrai charme parce qu'elle n'a rien à voir avec ses petits malheurs personnels mais est inhérente à l'être. Elle vous visite quand elle le souhaite et on ne "l'expose" pas, encore moins pour faire du charme. Vous voyez la différence ?. Au pays du Discours de la Methode, on gamberge ses malheurs et ressasse ses ressentiments. Et pourquoi rire ? Et pourquoi le rire est il pour moi bien plus seduisant ? Parce que je n'arrive pas à prendre au serieux ma vie et celle des autres, que je ne comprends pas grand chose à ma vie ni à celle des autres, et que je ne comprends et ne comprendrais jamais rien, mais vraiment rien aux femmes, vous avez raison là dessus. Alors la question serait donc plutôt : comme tout est si "mal barré" comment se fait il qu'il n'y ait pas un peu plus de rire au lieu de tant de ressentiment ?

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  5. Karl, ne changez rien, les femmes adorent les hommes un tantinet torturés qui gardent le sens de l'humour, et surtout ceux qui les écoutent sans jamais chercher à les comprendre. Et si en plus vous êtes grand, brun, le regard ombreux..

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  6. Karl,

    Marilyn, Gena, Romy, des petites bourgeoises ?

    Quel est le rapport entre le milieu social d'une femme et une douleur intime — un deuil, un chagrin d'amour, un abandon — qui la rend malade du temps ?

    Pourquoi les Françaises n'éprouveraient-elles pas de mélancolie ? Le mot n'est-il pas français ?

    Quel rapport entre la mélancolie et le ressentiment ? Tout montre qu'elle est la condition nécessaire de l'humour — fût-il ronchon, de mauvaise foi, ravageur, sarcastique, bousilleur.

    Les joyeux sont des fâcheux, des tristes sires et des gens bruyants.

    Ce n'est pas par hasard qu'on les appelle Ducons-Lajoie.

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  7. J'ajouterai mon cher Frédéric, le visage de Marie Rivière saisi par E. Rohmer à Biarritz face à l'océan, le " rayon vert " comme éclair ou éclat d'un regard en désespérance, qui parfois comme les vagues embrasant la " Roche Plate " renaît à chaque fin de journée.

    Que l'Océan vous protège.

    Philippe Chauché

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  8. Moi, je dirais que la mélancolie est le début d'une connaissance de soi et du monde. C'est de l'intelligence à haut débit - même si on préférerait être complètement heureux parfois, - ce qui cependant reviendrait en fait à regretter cette intelligence à haut débit ! Cercle vicieux !

    Les Françaises autrefois éprouvaient de la mélancolie, comme l'atteste Baudelaire évoquant "Ton front pâle, embelli par un morbide attrait"... !

    Je suis comme vous, cher Schiffter, nostalgique de ce temps révolu.

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  9. Chère Corinne,

    Merci à vous ! Hélas, je suis de taille moyenne :-(

    Cher Frederic,

    Marylin, Gena, Romy : d'excellentes actrices. Je crois que Romy, dans la vie, (sauf à la fin car elle a pris trop de coups) etait tout le contraire de ses rôles les plus tristes.
    J'ai decouvert il y a peu Delphine Seyrig et ilsemble qu'elle etait dans la vie à l'image de ses rôles. Mais comme dit Antoine Doinel, ce n'est pas une femme , c'est une apparition.

    Un deuil, un chagrin d'amour, un abandon n'ont, pour moi, rien à voir avec la melancolie. Pour l'eprouver il suffit de se sentir mortel, de s'en etonner puis de ne plus pouvoir s'en detacher ou alors temporairement. S'il suffisait d'un chagrin d'amour , d'un deuil ou d'un abandon pour être melancolique, nous le serions tous. (même s'ils sont des evenements favorables à son apparition)

    Melancolie française ? Calculs et comptabilité priment. Pour l'argent. Et les sentiments. Sentiment tragique de la vie ? Néant. Mais une grande déprime s'ils et elles n'ont pas ce à quoi ils et elles estiment avoir droit. C'est ce qui fait d'eux des ressentimenteux (qu'on prend à tort pour des idealistes révolutionnaires), prompts au coup de gueule ou à la revolte. Pas des melancoliques.

    Les joyeux ne sont pas forcement des enthousiastes fâcheux ou des insupportables optimistes. Des niais. Ceux dont je parle savent être ironiques et souriants, plutôt en retrait et craignent de vous marcher sur les pieds avec leur 'deprime'. Mais impossible pour eux de ne pas rire de temps à autre (pardon pour le bruit!) quand ils assistent à la comedie (souvent franchouillarde et mal jouée) de la morosité ambiante.

    Mais tous ces mots ne sont que mon pauvre et petit avis de ce soir. Qui sait, demain tout cela aura changé.

    Bien à vous,

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  10. Cher Karl,
    c'est peut-être une affaire de vocabulaire, une différence d'interprétation, un arrangement, que sais-je. Votre opinion en vaut une autre et l'essentiel est que vous trouviez, là où vous êtes, de quoi vous satisfaire.

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  11. Cher V,

    la plus perdue de toutes les journées étant celle où l'on n'a pas ri, aujourd'hui je vous remercie. Samba ! :-)

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  12. Karl,

    C'est chère V., dont la page est répertoriée là, ci-contre, parmi les blogues de qualité.

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  13. Alors mille excuses, chère V, mais votre ode à Arnaud le neuneu, bof...

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  14. M'enfin Karl! où voyez-vous une ode ? C'est un point de vue purement plastique, une appréciation esthétique temporaire. D'ailleurs, ce commentaire n'a pas sa place ici.

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