samedi 26 mars 2022

En traînant à la Chambre d'amour — II


Assis sur un des bancs du belvédère dominant les plages d’Anglet qui vont de la Chambre d’amour à la Barre, je laissais aller mes pensées. En regardant vers le phare de Biarritz, j’aperçus, posée sur la falaise, boulevard de la mer, la villa prétentieuse de l’ancien gendre de Vladimir Poutine. Par une association d’idées naturelle, le mot «oligarque» me vint à l’esprit. Je me demandais quel serait le visage de la France si sa politique intérieure et extérieure dépendait de puissants propriétaires — ou actionnaires — d’entreprises concentrant l’exploitation de l’énergie, les médias, l’agroalimentaire, la grande distribution, le crédit bancaire, etc. Heureusement, Bolloré, Bouygues, Arnault, Pinault, Niel, Pigasse, etc., n’ont rien de commun avec des oligarques occupés à faire main basse sur l’État et à en orienter la législation en fonction de leurs intérêts. Ce sont des hommes d’affaires avisés, richissimes, certes, mais soucieux de l’intérêt général. Républicains, tous montrent de l’aversion pour la corruption, le lobbying, l’intimidation. Il faut être complotiste pour s’imaginer qu’il y aurait collusion entre l’administration publique et tel ou tel groupe privé français, ou, à plus forte raison, étranger. Quand le ministère de la santé, sur le conseil du cabinet McKinsey, a décidé de mener une campagne massive de vaccination de la population, des enfants aux vieillards, personne, sauf une poignée d’antivax fascistes et antisémites, n’a douté que sa seule volonté était de sauver la vie de millions de gens et non de faire faire des bénéfices à un laboratoire américano-germanique — et d’offrir une belle rémunération au conseiller (clic). Tandis que j’exposais mon visage au soleil printanier, toujours par une association d’idées naturelle, je me disais que les États-Unis montraient aussi l’exemple d’un pays exempt du pouvoir d’oligarques. Tout lecteur du magazine Forbes sait que les capitalistes nord-américains se sont toujours éloignés de la politique, des manœuvres de déstabilisation de gouvernements sud-américains ou moyen-orientaux, pour ne se consacrer qu’à des œuvres philanthropiques. «да, да! Il n’y a qu’en Russie où sévissent des oligarques», ai-je dit en me levant de mon banc que des âmes vertueuses avaient peint aux couleurs de l’Ukraine.   


 

dimanche 20 mars 2022

En traînant à la Chambre d'amour



En traînant l’autre jour à la Chambre d’amour, je songeais à l’opération militaire spéciale qui se déroule en Ukraine. Il me revint que dans Le Choc des civilisations, Samuel Huntington prévoyait que les conflits à venir entre puissances ne seraient pas engendrés par des motifs économiques — pillages d’énergie et de matières premières —, mais seraient causés par des sursauts identitaires, culturels et religieux. L'Occident, chrétien, ou judéo-chrétien, rencontrerait l’hostilité du monde islamique, ou des pays asiatiques confucianistes, hindouistes, bouddhistes, communistes. On constate toute la solidité de cette thèse ces derniers temps. Israël soutient l’Azerbaïdjan contre l’Arménie chrétienne; les États-Unis, l’Europe, et Israël toujours, soutiennent l’Arabie saoudite et autres émirats, fiefs du salafisme, contre l’Iran; la République Populaire de Chine dispute ses frontières avec la République socialiste du Viet Nâm; la Corée du sud menace la Corée du nord d’une réunification; etc. L’exemple qui illustre le mieux la pertinence de la pensée géopolitique de Huntington est la récente invasion d’un pays russophone orthodoxe par un autre pays russophone orthodoxe. Un choc terrible entre deux civilisations que tout oppose: dans un camp, une Ukraine coiffée par une oligarchie et minée par la corruption, dans l’autre, une Russie gouvernée par une ploutocratie et gangrénée par la prévarication. En m’arrêtant devant la plage déserte des Sables d’or, je me dis qu’il n’était pas étonnant que l’Union européenne, réalisation politique de l’idée du Bien, ait choisi le camp dont elle partageait les valeurs.  

lundi 7 mars 2022

Un écrit court et bon est deux fois bon


«Si j’étais un législateur tout-puissant, je me contenterais d’édicter cette loi très simple: “La publication des livres ayant plus de cent pages est interdite.”». Il serait déraisonnable de ne pas approuver Henri Roorda. À cette loi, j’ajouterais un assortiment de peines en cas de contraventions — de lourdes amendes que devraient se partager auteurs et éditeurs. Seuls les dictionnaires garderaient toute liberté de dépasser mille pages, et encore, à condition de ne pas servir de poubelles aux mots qui traînent partout dans le journalisme, les entreprises, les vestiaires. 


In LASSITUDES — Éditions Louise Bottu (clic)