lundi 24 mai 2021

Conférence du vendredi 28 mai à la Maison Rouge de Biarritz

05 64 11 55 15 
20 Avenue Reine Victoria, Biarritz

Vendredi 28 mai, à 15h, on aura l’immense plaisir d’écouter ma conférence, à la Maison Rouge de Biarritz. Il fera doux et beau. L’événement aura lieu en extérieur, sur le joli parvis de la bâtisse. Le thème de ma causerie s’annonce passionnant: Croire et Savoir. Qu’on se le dise! 



 

vendredi 21 mai 2021

Du but de la philosophie depuis deux mille ans


Tous les philosophes de l’ère chrétienne, hormis Montaigne, Schopenhauer et Cioran, n’ont eu qu'un seul objectif: se liguer contre l’Ecclésiaste. 


 

lundi 17 mai 2021

So long, Bogie!


Photographie © Françoise Forget

Je fis la connaissance de Raphaël Sorin en 2005 au salon du livre d’Hossegor. Il publiait chez Finitude ses Produits d’entretiens, recueil d’articles sur des francs-tireurs de la littérature (Forton, Norge, Bounoure, Scutenaire, Ribemont-Dessaignes, Enard…), et mézigue, chez le même éditeur, mon Traité du cafard. Les organisateurs du salon eurent l’idée de nous faire papoter devant le public de notre passion pour les livres. Très vite nous nous mîmes à déconner, montrant par-là notre réelle passion, au grand désarroi de la modératrice qui ne put rien modérer du tout et pour la plus grande joie de l’auditoire. Une amitié était née. Nous nous revîmes à Paris quelques fois. Je faisais parler Raphaël de son travail d’éditeur. Il m’évoqua son amitié pour Gérard Guégan, Roland Jaccard, Michel Houellebecq, Michel Polac. Il maîtrisait l’art du portrait en quelques traits d’esprit. Très flatteur avec ceux qu’il aimait, impitoyable avec ceux qu’il méprisait. Mais toujours rigolard. Nous nous sommes vus une dernière fois en 2010. Je suivais ses chroniques sur son blog abrité par Libération. Un régal de style. Quand Raphaël Sorin était gamin, son idole était Humphrey Bogart. Il portait le même trenchcoat et se baladait avec une cibiche au bec. So long, Bogie.   


 

vendredi 14 mai 2021

Tribulations d'un hypocondriaque à Paris



Le Monde d’avant. Le titre rappelle Le Monde d’hier, de Stefan Zweig. Dans ses mémoires, Zweig évoquait les charmes d’une Europe qui se relevait de la boucherie de 14-18 avant qu’elle ne sombre dans un nouvel enfer de feu, de bombes, de massacres. Dans son journal intime qui couvre les années 1983-1988, Jaccard raconte une France qui commence à se lasser de François Mitterrand, qui craint le SIDA, qui admire ou déteste Bernard Tapie. Si on est loin de l’esprit viennois, on se laisse prendre par les pages d’un écrivain, journaliste et éditeur aussi suisse que parisien, amant heureux de la future romancière Linda Lê, ami d’écrivains à la mode et de psychanalystes — espèce aujourd’hui disparue —, habitué de la piscine Deligny, chroniqueur pour le supplément littéraire du quotidien Le Monde. On le voit déjeuner avec Gabriel Matzneff, Clément Rosset, Michel Polac, avec des confrères qui jalousent sa vie et sa désinvolture. Il se marre souvent au téléphone avec Cioran. Le Monde d’avant est l’autoportrait d’un quadragénaire qui a tout pour être comblé et qui l’est. De temps en temps, une sciatique ou une rage de dent lui rappellent sa finitude. Lorsqu’il est en proie à ces indispositions, Jaccard note qu’il côtoie le gouffre et flirte avec le suicide. Frimeur, il ne parvient jamais à être détestable. Il agace en séduisant, il séduit en agaçant. L’autodébinage est la politesse de son hypocondrie, le style, l’élégance de son égotisme. Le lecteur qui ne connaît pas Jaccard découvrira un diariste futile par profondeur et trouvera dans Le Monde d’avant une mine d’aphorismes. J’en choisirais deux. Sur la littérature: «Pourquoi donc si peu d’écrivains se rendent-ils compte que le journal intime, c’est la liberté […] alors que le roman a presque toujours quelque chose de contraint, de fabriqué, de décourageant. Déjà ce simple fait stupide et insupportable, qu’il faut un début et une fin. On sue dans le roman, on s’ébroue dans le journal intime.» Sur l’amitié: «L’amitié, je m’en rends compte une fois de plus, est un sentiment propre à l’adolescence. Elle lui survit ensuite, mais comme une nostalgie d’autant plus tenace qu’on voit bien avec un peu de lucidité qu’elle n’a plus vraiment matière à s’exercer et que si nous refusons d’en faire le deuil, c’est par crainte de la solitude, certes, mais aussi pour ne pas tuer l’adolescent en nous. Passé quarante ans, nous ne demandons qu’une seule chose à nos amis: respecter nos nerfs. Si, en outre, ils consentent parfois à nous écouter, alors ce n’est déjà pas si mal…» Il y a quelques années, Jaccard m’avait couru sur les nerfs — et réciproquement. Néanmoins je continuais de le lire, ce qui était la manière la plus amicale de l’écouter. 


 

jeudi 6 mai 2021

Du Patron, encore


Mon bref essai sur le Pessimisme chic paru dans Philosophie magazine me vaut des critiques. Je m’y attendais. Les professeurs de philosophie n'apprécient pas qu'on doute du tragique nietzschéen, et, surtout, dans leur milieu, Schopenhauer a toujours mauvaise presse. C’est bien normal. Parmi eux bien peu ont lu Schopenhauer et ceux qui ont eu l’honnêteté de le lire savent bien que l’intempestif c’est l’affirmateur de la douleur et de l’ennui, non pas le prophète du surhumain, le doctrinaire de la volonté de puissance, le visionnaire de l’éternel retour. Quand je fréquentais les bancs de l’université, Nietzsche était la vedette des étudiants contestataires et son Zarathoustra l’évangile des renverseurs de valeurs. Si Schopenhauer croupissait dans l’oubli, le dionysiaque moustachu bénéficiait de la réclame que lui faisaient Deleuze et Foucault qui cherchaient eux-mêmes une autre voix critique que le marxisme. Contrairement à Nietzsche, Schopenhauer n’aurait jamais pu servir de caution doctrinale aux nazis, puis, trente ans plus tard, aux gauchistes modernistes français. Le Monde comme volonté et comme représentation, de même que les Parerga et Paralipomena, ne furent jamais utilisés comme des instruments idéologiques, mais comme des sources de réflexion pour les plus grands écrivains. Là réside la supériorité intellectuelle d’un philosophe: quand la littérature se reconnaît dans sa pensée. Au reste, je ne connais pas d’autre exemple que Schopenhauer qui ait autant nourri les questions esthétiques des romanciers et des artistes des XIXe et XXe siècles — y compris Proust, superficiellement perçu comme un bergsonien. Mais rien n’est plus logique. Schopenhauer était un styliste qui mettait le sarcasme, le trait, l’épigramme, l’injure, la citation, la parabole, au service de l’analyse, du développement, de la dissertation. Jamais rien de ronflant, de grandiloquent, de délirant, ne venait sous sa plume. Plutôt l’art de la pointe que le dithyrambe, plutôt l’humour que l’exaltation. Voilà pourquoi Clément Rosset, humoriste lui-même, explique dans un entretien que non seulement Schopenhauer lui donna le goût de lire des pages "simples et vraies", mais aussi d’en écrire — afin, sans doute, de faire partager à ses propres lecteurs l’enchantement — dixit — que le maître du pessimisme lui fit éprouver. Ce fut le cas pour moi. Schopenhauer c'est le Patron, Clément Rosset un modèle.