«Quand j’étais en grâce auprès du prince et qu’il me prêtait le crédit
dû aux conseillers désintéressés, je l’avais dissuadé de céder à son premier
mouvement de faire arrêter ce buffone insolent
qui amusait les rues de Florence en jouant des fables satiriques et
irrévérencieuses de son invention. Je lui montrai que le peuple semblait apprécier
l’insolence du larron et, qu’au lieu de le courroucer en le privant de ces
petits spectacles malpropres, il était plus sage de lui laisser penser que sa
majesté, soucieuse du bien être de ses sujets, était satisfaite de le voir y
prendre plaisir. Ayant admis que le remède serait pire que le mal et qu’il y
avait plus grande sûreté à ce que la plèbe se divertît au détriment de sa
personne plutôt qu’elle s’en prît à son gouvernement, mon maître laissa donc le
pendard s’adonner à ses farces jusqu’à ce que son public finît par s’en lasser.»
Nicolas Machiavel
(Lettres à Giacomo Martini)