vendredi 28 décembre 2012

De la constance des cons


«Lorsque quelqu'un demande à quoi sert la philosophie, écrit Gilles Deleuze, la réponse doit être agressive, puisque la question se veut ironique et mordante.[…][La philosophie]sert à nuire à la bêtise, elle fait de la bêtise quelque chose de honteuxQuelle naïveté… La bêtise ignore la honte; l’agressivité lui est consubstantielle et c’est pourquoi elle nuit depuis toujours au philosophe — contraint au stoïcisme.  


4 commentaires:

  1. "Ainsi opposera-t-on volontiers, à l'intelligence attentive, agile, vigilante, une sottise considérée comme endormie, anesthésiée, momifiée. Aussitôt se présente à l'esprit une première objection: cet être sclérosé qu'on nous présente comme le sot est une antithèse purement théorique et comme automatique de l'intelligence, mais n'est aucunement le portrait du crétin en chair et en os. Car le crétin que nous connaissons n'est nullement endormi, anesthésié, momifié: au contraire, il est actif, se dépense de tous côtés, est perpétuellement sur la brèche." écrit Clément Rosset dans une Note brève sur la sottise.
    Le philosophe ne semble pas être seul à affronter la bêtise. Le romancier se trouve dans la même posture. Tel fut le cas de Flaubert qui s'est enquis de l'épingler sous de nombreuses coutures.
    Ce même Flaubert qui vous donne raison cher Frédéric Schiffter. J'ouvre son Dictionnaire des idées reçues à la lettre M et je lis:" MÉTAPHYSIQUE
    En rire : c’est une preuve d’esprit supérieur." A la lettre P:"
    PHILOSOPHIE
    Toujours en ricaner."

    Bien à vous et courage face aux Trissotin

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    1. Cher Pascal Klein,

      Merci pour votre visite et pour la rafraîchissante considération de Clément Rosset. J'en retiens notamment ce passage semblant destiné tout particulièrement à A. Jugnon qui ne cesse de m'accabler de commentaires dont j'épargne la lecture aux abonnés de ce blogue: " Le crétin que nous connaissons n'est nullement endormi, anesthésié, momifié: au contraire, il est actif, se dépense de tous côtés, est perpétuellement sur la brèche ".

      Tout à fait ça. Oui.

      Bien à vous,

      FS

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  2. Cher Frédéric,

    Lisant hier soir ma page de Cioran avant le dormir, je suis tombé sur ce passage :

    « Tout système se construit aux dépens d’un autre, en un certain sens de tous les autres. Il est incroyable à quel point l’agressivité fait partie de la nature intime d’un philosophe. Bergson lui-même a avoué que toute son œuvre est une œuvre de protestation. On pense toujours contre quelqu’un ou quelque chose. Toute l’astuce est de dissimuler cette attaques et de lui prêter un déguiser impersonnel. Les penseurs objectifs sont plus malins que les autres ».

    Très amicalement
    Axel

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    1. Cher Axel,

      Même si la remarque de Cioran ne concerne pas vraiment le contenu de mon billet, elle me donne l'occasion de dire que je l'approuve et aussi que, pour ma part, tous mes opuscules sont polémiques — sauf, peut-être, ma Petite philosophie du surf.

      Maintenant, "polémiques" ne signifie pas forcément "agressifs". L'agressivité suppose des coups bas, au-dessous de la ceinture, ce qu'on appelle des attaques ad hominem, ou encore le recours à des rapprochements ignobles. Vous pensez comme moi au Savonarole de la pureté libertaire qui, aujourd'hui, de sa chaire subventionnée, déploie une violente bêtise pour décréter que les Juifs sont des génocideurs, Platon un pré-inquisiteur, Kant un pré-nazi, Freud un sadique halluciné, Bergson un fasciste — et j'en passe.

      Au fond, le mieux, peut-être, pour se faire une idée de la teneur en agressivité d'un philosophe ou d'un intellectuel, c'est d'observer ce qu'il en est chez ceux qui se coiffent de son autorité ou de son magistère. Ainsi voit-on que ce qui motive ces derniers à suivre leur mentor ne relève pas de l'intellect, mais, simplement, de l'affect. Philosopher réellement les obligerait à penser contre eux-mêmes; or, non seulement ils ne désirent pas pareille inquiétude si salubre pour l'intelligence, mais ils la refoulent avec force pour laisser libre-cours à leurs certitudes et dogmes qu'ils trouvent mieux formulés chez leur maître-leader que sous leur propre crâne.

      Bon, hop!, mes lunettes de piscine, mes bouchons d'oreilles, et, zou!, je vais faire le hamster marin.

      À vous,

      Frédéric

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