dimanche 3 octobre 2010

Vivre et mourir devant une caméra

En choisissant George Sanders pour incarner Lord Henry Wotton dans son film The picture of Dorain Gray (1945), Albert lewin ne pouvait rendre meilleur hommage à Oscar Wilde. Dans ses Mémoires, l'acteur relate sa manière de jouer les rôles de pervers et de criminels. "Ma méchanceté était d'un genre nouveau. J'étais infect mais jamais grossier. Une espèce de canaille aristocratique. Si le scénario exigeait de moi de tuer ou estropier quelqu'un, je le faisais toujours de manière bien élevée et, si j'ose dire, avec bon goût. En plus, je portais toujours une chemise impeccable. J'étais le type de traître qui détestait tacher de sang ses vêtements ; pas tellement parce que je redoutais d'être découvert, mais parce que je tenais à demeurer propre sur moi". Dandy cynique à l'écran, Sanders l'était avant tout dans la vie. Parce qu'il ne voulait plus s'y compromettre, il se suicida en 1972 à l'âge de 66 ans. Avant que n'apparaisse le mot "FIN", il avait griffonné sa dernière réplique destinée à ses proches et, sans doute, à ses admirateurs. "Je m'en vais parce que je m'ennuie. Je sens que j'ai vécu suffisamment longtemps. Je vous abandonne à vos soucis dans cette charmante fosse d'aisances. Bon courage."

3 commentaires:

  1. "Je m'en vais parce que je m'ennuie. Je sens que j'ai vécu suffisamment longtemps. Je vous abandonne à vos soucis dans cette charmante fosse d'aisances. Bon courage."
    Quel cynisme! J'adore!
    Cela dit, je n'ai jamais vraiment eu l'envie de me suicider pour pareils raisons. Autant je suis fatigué de m'ennuyer ici, autant l'idée de mourir m'est encore plus insupportable.
    J'imagine "qu'on" en est tous plus ou moins là. Condamné à vivre une vie médiocre et sans intérêt, mais qu'on ne voudrait pour rien au monde quitter.

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  2. Il vous lit et par vous Sanders, amusant et détaché, réjouissant et fleuri, comme doivent l'être les tombes et les lits.
    Il vous lit et pense à Curro Romero un printemps à Séville coupant - enfin - une oreille à un taureau, la déposant sur les planches avant d'effectuer son tour d'honneur. Que cela - l'oreille sanglante -, semblait-il dire, ne tâche point par son ordinaire, l'extraordinaire de mon attitude.
    Je vous salue bien.
    Philippe Chauché

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  3. Ne trouvent pas ce monde ennuyeux et désespérant ceux qui ne peuvent s'empêcher de le comparer à un monde idéal illusoire ?

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