Quelques lecteurs de Contre le peuple trouvent que je m’y montre sévère avec George Orwell. J’y raille en effet sa notion de décence commune et son hygiénisme esthétique — son obsession de la decency et de la sanity. Mon opus n’était pas le lieu pour rappeler que les œuvres qui l’ont rendu célèbre, La Ferme des animaux (1945) et, surtout, 1984 (1948), censées dénoncer le totalitarisme bolchévique, n’eussent peut-être pas vu le jour sans l’existence de Nous autres d’Eugène Zamiatine et de Le Zéro et l’Infini d’Arthur Koestler. Écrits respectivement vingt et dix ans plus tôt, ces deux romans déclenchèrent des tirs nourris d’insultes et de calomnies de la part des communistes européens et autres compagnons de route. Orwell, qui avait lu ces chefs-d'œuvre, s’en était inspiré, notamment pour 1984, sans jamais atteindre, selon moi, à leur lucidité, à leur férocité ni à leur qualité narrative. Zamiatine connut les geôles tsaristes et léninistes, Koestler les prisons franquistes et fut témoin direct des procès de Moscou. Forts de leurs épreuves, tous deux ne se faisaient aucune illusion sur les humains au contraire d’Orwell que l’expérience de la Guerre d’Espagne n’avait pas vacciné contre l’espoir d’un socialisme humaniste et qui s’obstina à en défendre l’idée en faisant, disait-il, «de l’écriture politique un art». Pareille devise trouva en Sartre un doctrinaire. Le roman encagé n’est pas mon genre de beauté littéraire.
mercredi 23 décembre 2020
Zamiatine, Koestler, Orwell
Eugène Zamiatine
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Décence commune mes fesses,
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oui mais bon...
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