Joseph Ratzinger est mort le 31 décembre dernier. L’événement a été occulté par la fête païenne qui tombe ce même jour. J’ai admiré le pape, en particulier la fermeté avec laquelle il empêcha que des prélats fussent poursuivis pour de prétendus actes pédocriminels, mais, bien avant son pontificat, le préfet de la Congrégation pour la doctrine de la foi — poste qu’il occupa de 1981 à 2005. On oublie qu’au sein de la Curie romaine, la Congrégation pour la doctrine de la foi remplaça — en 1965 — la Sacrée congrégation du Saint-Office qui lui même succéda — en 1908 — à la précieuse Inquisition romaine. Pendant 24 ans Joseph Ratzinger sut taire en lui l’esprit éclairé par des études philosophiques pour lutter contre les hérésies et les pratiques sexuelles contraires aux bonnes mœurs chrétiennes. L’homme de Dieu ne céda pas à la facilité de réviser les procès instruits par ses prédécesseurs contre Giordano Bruno et Galileo Galilei. Au nom de l’amour du Christ, les deux hérétiques avaient mérité leur condamnation, le premier le bûcher, le second, après avoir abjuré ses billevesées scientifiques, l’assignation au silence. Mais là, où, à mes yeux, Ratzinger se montra glorieux, c’est lorsque, dans une audience de 2001, il salua la mémoire de Cyrille d’Alexandrie, ce bon évêque du quatrième siècle, qui incita des moines zélés à lapider, écorcher, démembrer, la philosophe Hypatie. Il faut dire que non seulement elle enseignait déjà l’invraisemblable théorie héliocentrique de notre système planétaire, mais qu’elle apparaissait à ses étudiants, selon un témoin de l’époque, comme si «l’esprit de Platon logeait dans le corps d’Aphrodite» — autrement dit comme une créature de Satan.
Avec la mort de Joseph Ratzinger, l'Église catholique vient de perdre un inquisiteur comme, je l’espère, elle en fera encore.