Château de Pinsaguel
Je ne résiste
pas au plaisir de montrer aux abonnés de ma page la trouvaille que j’ai faite
en consultant les archives de la Bibliothèque Régionale de Toulouse. Il s’agit
peut-être du premier document faisant état de l’étiolement. C’est une lettre adressée à une dame de haute naissance
— dont je n’ai pas réussi à identifier le nom — écrite de la main d’un gentilhomme,
Monsieur de Costesesque, marquis de Pinsaguel, datant du 13 mars 1652: «J'ai peur Madame, que vous croyiez que je ne
parle pas ici sérieusement; mais cela serait contraire au respect que je vous
dois, et que je ne manquerai jamais de vous rendre. Je puis dire, avec vérité,
que l’habitude que j’avais prise il y a peu de temps de me vouer à la lecture
des philosophes et à l’exercice de la raison dont ils font exploit, que cette
habitude, donc, m’a plongé depuis des semaines en une sorte d’alanguissement de
mes esprits animaux. C'est cette terrible incommodité que mon docteur, le
savant Monsieur Poutard, nomme étiolement, qui m’a poussé à la décision de me retirer aux champs d’où je vous
écris. Car à la ville, qu’elle soit la plus occupée du monde ou la plus
tranquille, le risque est trop grand d’y rencontrer des gens qui se piquent de
philosophie et qui, non encore atteints par l’étiolement, pourraient aggraver
le mien. Si je prends la liberté de vous écrire, Madame, c’est pour vous mettre
en garde contre tout quidam se coiffant de la qualité fantaisiste d’«ami de la
sagesse» qui ne manquera pas de provoquer chez un être de nature délicate, tel
que vous Madame, un dépérissement de l’entendement et des muscles. Mais ce
billet m’a coûté de la force. Je souhaite qu’il armera votre prévention contre
le danger de l’étiolement philosophique et qu’il vous rappellera que je suis,
Madame, votre indéfectible serviteur.» Bien évidemment, si mes recherches
me conduisent à dénicher d’autres pépites de ce genre, je ne manquerai pas de
les publier ici afin de satisfaire au désir d’édification de mes lecteurs.