On connaît le mot de Pascal selon quoi «tout le malheur des hommes vient d’une seule chose, qui est de ne savoir pas demeurer en repos dans une chambre.» À raison, le philosophe tient pour lui que les hommes privés d’activités se trouvent en proie à l’ennui, temps mort durant lequel leur «condition faible et mortelle» les obsède. Il leur faut donc se divertir de pareille pensée angoissante. Cependant, quand il dit: "les hommes", Pascal ne pense pas aux mal lotis, aux gueux, aux sans-grades, mais aux nobles. Le divertissement dont il parle désigne des distractions propres à cette classe privilégiée, comme la galanterie, la chasse, le jeu, la guerre, etc. Pascal est bien le philosophe des nantis, car enfin les pauvres sont eux aussi en proie à l’inquiétude métaphysique. Pourquoi s’adonnent-ils à des tâches pénibles et acceptent-ils n’importe quels emplois, sinon, en dehors du gagne-pain qui leur est accordé, pour ne pas penser au tombeau qui les attend? La conversation avec les belles femmes, les jeux d’intrigues, les réjouissances que la fortune procure, etc., étant des occupations hors de leur portée, ils n’ont d’autre divertissement que le travail. En raccourcir la durée hebdomadaire est une erreur, en raccourcir les années une faute. Comment peut-on retirer au vieux cantonnier son marteau-piqueur? À la doyenne des caissières sa caisse? À l’enseignant senior ses élèves connectés? Pourquoi les condamner, dès la soixantaine, à un vide de la vie traversé de l’air froid du cimetière? Reculer de deux ans l’âge de départ à la retraite ne relève pas donc d’une nécessité budgétaire, mais existentielle. Permettre aux salariés de travailler sans limite d’âge jusqu’à la mort serait une décision humaniste.

Le sarcasme est La Voie d'un humanisme bien tempéré.
RépondreSupprimerJe file, la couette est encore chaude.