dimanche 9 novembre 2025

Mes hommages, Judith Wiart


Les titres de la table des matières de ces Carnets d’un honnête hommesont déjà un délice à eux tout seuls: 

Du pessimisme chic, Le martyr de l’élégance, La rengaine du désespoir, Apprendre à mourir en dilettante, Le plaisir d’être méchant, Petit abécédaire du farniente … 

Les lecteurs de Frédéric Schiffter familiers de cette mélodie si singulière envient ceux qui ne la connaissent pas encore et s’apprêtent à rencontrer le style & la pensée du Philosophe sans qualités, «qui ne se pique de rien». 

Frédéric Schiffter a la générosité du lecteur-penseur-passeur, «gai dans la tristesse de la mort qui vient, triste dans la gaieté des plaisirs fugaces». Ses Carnets d’un honnête homme  sont ceux d’«un ami qui nous écrit». L'homme perdu, à la recherche d’une morale ou d’une doxa, sera joyeusement dérouté par le philosophe & penseur qui cultive l'art du paradoxe sans jamais chercher à intimider celui qui tourne les pages: son propos est une conversation avec le lecteur, sous forme de fragments construits comme des petites pierres gracieusement ciselées pour créer un joyau final («objet de matière précieuse», «chose rare et belle de grande valeur» CNRTL). 

Ce joyau-là — pas besoin de le chaparder ! – est publié par l’excellente maison Le Condottiere (clic) et vaut 15 euros. 

J'ai sciemment gardé pour la fin le plaisir de citer un extrait du chapitre intitulé: Montaigne et l’Ecclésiaste

«Au chaland – de son temps et d’aujourd’hui – qui consulterait les Essais dans le but d’y trouver un enseignement ou des conseils pour atteindre à une vie bonne, heureuse, réussie, vertueuse, solaire, il annonce sans détour: “Je n’y ai nulle considération de ton service.”» (page 114)Disant cela, Montaigne est beaucoup plus «au service» de ses contemporains que n’importe quel pseudo-sage, intellectuel ou donneur de leçon d’hier ou d’aujourd’hui. 

Merci à Frédéric Schiffter d'avoir la sagesse de nous le rappeler.

Judith Wiart 


 

samedi 1 novembre 2025

Ce que dit Aude Lancelin est beau et vrai


Les carnets de mon cher ami Frédéric Schiffter, pessimiste chic et styliste de haute précision. Une série de brèves pièces étincelantes, dans la veine de Philosophie sentimentale qui lui valut le prix Décembre en 2010.

Parmi les morceaux de bravoure du recueil : Le désir de destin, où figure un portrait novateur et magnifique de Jésus-Christ, comme seul un athée pouvait en écrire.

In tristitia hilarisin hilaritate tristis, telle est la devise du philosophe balnéaire Schiffter. 

Gais dans la tristesse de la mort qui vient, tristes dans la joie des plaisirs qui filent.

Ainsi serons-nous jusqu’à ce que la mort nous sépare.


 

jeudi 9 octobre 2025

Delphine Horvilleur ou la laïcité sans Spinoza


Baruch Spinoza doit l’essentiel de sa philosophie politique, comme d’ailleurs l’essentiel de sa philosophie, à Thomas Hobbes. Qu’importe si peu de lecteurs reconnaissent la dette de l’auteur du Traité théologico-politique à l’égard de l’auteur du Léviathan. Admettons que Spinoza ait été le premier à théoriser la laïcité, c’est-à-dire la nécessité de dissocier les pouvoirs respectifs du religieux et du civil afin que les individus, à savoir les citoyens, ne suivent que les lois juridiques censées procéder de la raison indiquant l’intérêt général, et non des préceptes relevant des fables bibliques qu’exploitent les autorités cléricales. Accusé d’hérésie en 1656 par les rabbins d’Amsterdam — alors même qu’il n’avait rien publié —, Spinoza fut excommunié par un violent décret (clic)le condamnant à vivre à La Haye et interdisant à tout Juif, ami ou parent, de lui venir en aide. L’actuelle synagogue d’Amsterdam tient toujours Spinoza pour un hérétique. Personne n’a songé à demander à Delphine Horvilleur, si, en sa qualité de rabbin œuvrant pour un «judaïsme en mouvement» héritier de la Haskala — les Lumières juives — et avocate de la laïcité, elle comptait agir pour réhabiliter Spinoza. À ma connaissance, pareil projet ne fait pas partie de ses vues progressistes. Pour Delphine Horvilleur le philosophe dont elle devrait se réclamer n’est-il qu’un mauvais Juif? Parmi les malédictions divines auxquelles les gardiens de la foi d’Amsterdam vouèrent Spinoza, figure celle-ci: «Sachez que vous ne devez lire aucun de ses écrits.» Obéissant à ses lointains prédécesseurs, Delphine Horvilleur, n’a, à l’évidence, ni lu, ni médité, le penseur maudit.

mardi 5 août 2025

vendredi 9 mai 2025

Ceci n'est pas un génocide


En 1943, Raphaël Lemkin, juriste américain d’origine polonaise, crée le terme de «génocide» pour désigner «un crime commis avec l’intention de détruire, en tout ou partie, un groupe national, ethnique, racial ou religieux». En 1948, l’ONU adopte la Convention pour la Prévention et la Répression du Crime de Génocide et reprend la définition de Lemkin. Officiellement, l’ONU mentionne trois génocides au vingtième siècle. Le premier perpétré contre les Arméniens (1915-1923), le deuxième contre les Juifs d’Europe (1941-1945), le troisième contre les Tutsis rwandais (avril-juillet 1994). 

Peut-on parler d’un tel crime dont l’État israélien se rend coupable dans l’enclave de Gaza depuis octobre 2023? Si les bombardements massifs et incessants causant la mort de dizaine de milliers de gens, si la destruction systématique des hôpitaux et l’élimination des équipes médicales, si l’entrave à l’acheminement de l’aide humanitaire provoquant famine et épidémies étaient intentionnels, il y aurait génocide. Or, il est patent que l’État juif NE FAIT ABSOLUMENT PAS EXPRÈS de raser Gaza, d’en massacrer les habitants et, bientôt, d’en déporter les survivants. Tout cela se produit par inadvertance. On voit très bien quelle pensée nauséabonde s’exprime chez ceux qui prétendent le contraire.