Même si la prudence conseille de ne pas rendre un trop grand service à un ami afin qu'il ne vous fasse pas payer au prix fort la dette qu'il vous doit, il arrive que l'amitié allège la vie. Il est curieux que j'attende la même chose de l'amour, conscient qu'il complique tout. Guetter un signe de l'aimée m'est une agonie. Je vis dans la terreur qu'elle me quitte, qu'elle me jette dans la gueule du vide, qu'elle me rende à moi-même. Mais là, rien d'original. La société n'est qu'un vaste orphelinat où les pensionnaires cherchent en pure perte à s'adopter entre eux.
Cher ami, je ne peux en ce jour où sur Avignon domine le débraillé, que faire mienne ces réflexions, j'ajouterai simplement, que le Diable en ces temps se réjouit du tour que prennent les choses de la vie, et du mauvais tour permanent que l'on nous joue.
RépondreSupprimerUn regard vous illumine, comme vous l'écriviez il y a quelques temps dans un journal fameux, son absence vous plombe à jamais et vous rend à votre état premier de gangue.
Bien à vous
Philippe Chauché
Propos impeccable duquel une "correspondance" s'est établie entre "en pure perte" et son pendant "à fonds perdus". Cet écho, je le dois à un poème de Tristan Corbière intitulé A la mémoire de Zulma présent dans Les Amours jaunes (1873). A la relecture du poème, il m'a semblé qu'il ne détonne guère de l'esprit "shifférien" en la matière. Je me permets de le reproduire dans son intégralité. Que le modérateur me pardonne si d'aventure je venais à être à côté de la plaque.
RépondreSupprimerÀ la mémoire de Zulma
Vierge-folle hors barrière
et
D’UN LOUIS
Bougival, 8 mai.
Elle était riche de vingt ans,
Moi j’étais jeune de vingt francs,
Et nous fîmes bourse commune,
Placée, à fonds perdu, dans une
Infidèle nuit de printemps...
La lune a fait [un] trou dedans,
Rond comme un écu de cinq francs,
Par où passa notre fortune :
Vingt ans ! vingt francs !... et puis la lune !
— En monnaie — hélas — les vingt francs !
En monnaie aussi les vingt ans !
Toujours de trous en trous de lune,
Et de bourse en bourse commune...
— C’est à peu près même fortune !
. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
— Je la trouvai — bien des printemps,
Bien des vingt ans, bien des vingt francs,
Bien des trous et bien de la lune
Après — Toujours vierge et vingt ans,
Et... colonelle à la Commune !
. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
— Puis après : la chasse aux passants,
Aux vingt sols, et plus aux vingt francs...
Puis après : la fosse commune,
Nuit gratuite sans trou de lune.
Saint-Cloud. — Novembre.
Bien à tous
Pascal KLEIN
"schifftérien", pardon.
RépondreSupprimerVous étiez pardonné. Merci pour ce poème de Tristan Corbière. Bien à vous.
RépondreSupprimerCher Frédéric,
RépondreSupprimerSuite à tes intermittences du coeur et avant de me rendre à la plage, il me vient ces deux petites réflexions :
Ouvrir la portière d'une femme c'est lui fermer l'envie de partir
La plus grande vengeance d'une passion consiste à nous empêcher d'en vivre une autre.
J'approuve, mon cher Claude, ce que tu m'écris. Le cœur a ses raisons, etc.
RépondreSupprimer"La société n'est qu'un vaste orphelinat où les pensionnaires cherchent en pure perte à s'adopter entre eux."
RépondreSupprimermérite de passer à la postérité
Pendant que les combats font rage contre Onfray et les onfrayeurs en ce mois d'avril 2013, et ayant peur de me prendre quelque éclat d'abus, je viens flâner dans les débuts du blog(ue), il y a environ 1000 jours, à la recherche d'un petit billet sentimental.
RépondreSupprimerLes Ad usum mei d'avril 2013 ont un parfum de lycée et de versions latines, Gaffiot sous le bras, puisque trop gros pour rentrer dans le cartable. J'ai été déçue récemment de m'apercevoir en le ressortant d'une vieille bibliothèque qu'il est moins gros que dans mon souvenir.
Nostalgie du latin, et de la jeune fille de 17 ans qui allait découvrir tous les émois et toutes les complications du sentiment amoureux.