Pouvez-vous me parler d’un mortel, très chère Lucille, qui accorde du prix au temps, qui reconnaisse la valeur d’une journée, qui comprenne qu’il meurt chaque jour ? Notre erreur est de voir la mort devant nous. La partie de la vie qui est derrière nous appartient à la mort. Faites donc, ma jeune amie, ce que vous me dites dans votre billet : saisissez-vous de chaque heure. Ainsi vous vous serez emparé du jour présent. On remet la vie à plus tard, pendant ce temps elle s’enfuit.
On pense à Montaigne :
RépondreSupprimer"Tous les jours vont à la mort, le dernier y arrive."
Cher Frédéric Schiffter,
RépondreSupprimerN'évoquez-vous pas ici les mots d'Horace ?
Tu ne quaesieris (scire nefas) quem mihi, quem tibi finem di dederint, Leuconoe, nec Babylonios temptaris numeros.
Vt melius quicquid erit pati, seu pluris hiemes seu tribuit Iuppiter ultimam, quae nunc oppositis debilitat pumicibus mare Tyrrhenum.
Sapias, uina liques et spatio breui spem longam reseces. Dum loquimur, fugerit inuida aetas : carpe diem, quam minimum credula postero.
bien souvent mal interprétés mais remis ici par vous tels en tout cas que je les comprends, savoir quelque chose comme :
Toi, ne cherche pas à savoir (il est sacrilège de le savoir) quelle fin pour moi, quelle fin pour toi les dieux ont assignée, Leuconoé, et ne sonde pas les calculs babyloniens.
Comme il est mieux de supporter tout ce qui sera, soit que Jupiter t'ait accordé plusieurs hivers encore, soit qu'il t'ait accordé ultimement celui qui maintenant brise la mer tyrrhénienne sur les roches poreuses qui lui font face.
Tu ferais mieux de filtrer ton vin et d'un bref moment
de tailler les longues espérances! Pendant que nous parlons, le temps se sera déjà enfui, jaloux.
Cueille le jour, le moins possible confiante au lendemain.
...Ou suis-je complètement dans l'erreur ?
Bien cordialement,
Jean-Michel
Cher Frédéric, ça donne très envie de lire cette lettre, aujourd'hui introuvable, même pour les fins limiers semble-t-il ...
RépondreSupprimerTrès chère Lucille,
RépondreSupprimerLe Doctor Schiffter vous a prescrit un séjour de quelques semaines à La Plantación, voici donc votre billet d’avion, des précisions sur l’emploi du temps et quelques détails pratiques.
Dites à la Schiffterina, que sa présence nous manque, même le gros Vasquez de temps en temps à La Melancolía !
Hasta pronto,
Alfonso
Cher JMT,
RépondreSupprimerJe me suis rendu coupable d'un détournement de la Lettre 1 à Lucilius de Sénèque le Stoïcien, lequel, il est vrai, détourne Horace qui était, lui, épicurien.
Il est amusant de voir combien Sénèque fait souvent preuve de ce que j'appelle le "riquiqui" et qui, en l'occurrence, consiste à piquer des formules dans la secte rivale, parce qu'on est séduit par elle, mais sans oser le dire.
Ce refus peureux de se laisser séduire par une pensée ou un style qui agace et qui, conséquemment, se retourne contre elle sous la forme d'une agressivité est un riquiqui assez courant chez Sénèque. Il n'y a qu'à lire le "De otio" où sa négation de l'épicurisme exprime tout le penchant honteux qu'il éprouve pour cette pensée.
Amicalement,
FS
Et la photo, est-elle détournée ?
RépondreSupprimerStirner
Oui, la photo est détournée. Ou plutôt empruntée au blogue de Laura-S, une délicieuse disciple mienne.
RépondreSupprimerLittle Richard, honteuse typique, avait aussi détourné la lettre à Lucilius
RépondreSupprimerhttp://www.youtube.com/watch?v=z3-OaNevkfg
Passons,
RépondreSupprimerPassons puisque tout passe
Puisqu'on ne sait le temps qu'il reste,
Voyons le temps qu'il fait.