mercredi 16 mars 2011

Embarquement pour Cyrène

Alors que j’entendais l’autre jour que des hommes s’entretuaient sur la côte cyrénaïque, je pensai aussitôt à Aristippe qui fit autrefois le voyage de Cyrène à Athènes pour rencontrer Socrate.
Cet apatride spirituel, élégant, et dont la débauche offusquait le puritanisme des Cyniques, fut l’auteur d’une vingtaine de petits traités moraux brillants volatilisés dans le devenir. Formulés en manière de lettres ou d’adresses — Pour Laïs (une courtisane qui devint sa compagne), Pour Arété (sa fille), Aux exilés, Aux mendiants, À ceux qui me reprochent d’aimer le vin, les courtisanes et les banquets, etc. —, ces textes suggèrent qu’Aristippe concevait la philosophie comme un bavardage aimable ou polémique — ce qui ne l’empêchait pas de soutenir par ailleurs que les dieux avaient donné le langage aux hommes pour qu’ils ne se comprennent pas. 
Aristippe n’accordait pas une grande valeur à la vie ni une grande estime aux humains. On ne changera rien à la confusion de la matière et des apparences. S’attellerait-on à la tâche, on ajouterait le chaos au chaos. À quoi bon gesticuler et se fatiguer davantage ? La sagesse en appelle à l’abstention de toute action et à se limiter à quelques plaisirs. À défaut de se connaître soi-même, puisque l’âme n’existe pas, chacun peut dresser la liste subjective des biens qui réjouissent son corps, qui, très vite, n’existera plus. Comme les douleurs, et même s’ils s’avèrent plus rares et moins durables, les plaisirs ponctuent les jours et les nuits. À chacun de faire preuve du talent de n’en bouder aucun, surtout s’ils ont tous l’arrière-goût faisandé de la mort.

5 commentaires:

  1. ¿ Aristippe ? ¡Coño! Eso es un filósofo !

    Alfonso.

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  2. callicles16 mars, 2011

    Bah ! Trop onfrayant cet Aristippe...

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  3. Cher Calliclès, le pauvre Onfray, contrairement à Aristippe, n'a jamais goûté qu'à des plaisirs théoriques — ce que, bien sûr, ses suiveurs, naïfs et mal renseignés sur son compte, ignorent.

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  4. Alfonso, garçon de piscine à Ténérife16 mars, 2011

    Hier, le Colonel Kadhafi s’est présenté à l'hôtel avec une caravane de 50 chameaux et 150 hommes armés. Maintenant, sa tente se dresse au bord de la piscine.
    En ce moment, il observe militairement les allers-retours rectilignes de mon robot de piscine.
    Avec un regard pensif et visionnaire, il me dit : "beau travail Alfonso..." puis, énigmatiquement, il ajoute, « Alfonso, tu as été enfant de cœur, tu connais les évangiles…dans l’évangile de Jean, ton Jésus n’a besoin de personne pour l’aider à porter sa croix, Simon de Cyrène n’intervient pas ! ».
    Peu habitués aux chameaux et au vert militaire les bougainvillées tremblent un peu.

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  5. Quel talent pour inviter à la détestation ! Votre obscénité ferait craquer un Spinoza, un Epictète ou un Pyrrhon. Difficile de dépouiller l'homme. Aristippe partouze avec les Kadhafi pendant qu'on égorge les révoltés. Cyrène mon amour, embarquement immédiat. Venez lecteurs, venez !

    Guillaume

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